26 février 2006

J'endure

Parfois, il y a dans une journée des heures un peu oubliées, un peu perdues, presque invisibles, presque absentes, des heures un peu à la bordure du monde, des heures qui sont un peu tout à la fois, un peu rien, sûrement pas grand chose.

Ces heures-là arrivent du fond de l'estomac, elles remontent dans la gorge et finissent toujours crachées. On finit par les vomir et le goût qu'elles nous laissent dans la bouche est un goût d'ailleurs, un goût de cendre, un goût d'avant, d'autrefois, d'hier.

Ce sont des heures d'en bas, d'en dessous, des heures qui se cachent sous les fondations du monde, elles se tapissent derrière nous, surgissent sans qu'on s'y attende, elles passent devant et nous affrontent, elles nous font face et nous font taire.

Quand je sens ces heures arriver, quand je les sens pointer au fond de mon estomac, je me recroqueville et comme un petit enfant tout seul dans le noir, je pleure et j'attends, je prie et je chante. J'apprends à les connaître, j'apprends à les comprendre, j'apprends.

Quand ces heures arrivent, je me recroqueville et je pense à toi.

Je pense à toi, tu sais. Je pense à toi et ça suffit. Recroquevillé, je fais face. Je subis, je plie, je souffre mais je tiens bon. J'endure ces heures du mieux que je le peux.

Seul dans le noir, comme un petit garçon, je pense à toi et cette pensée me sauve.