08 juin 2007

Pause

Je mets ce Blog en pause pour un temps indéfini. J'ai énormément de choses à écrire, mais très peu de temps pour le faire, surtout que je travaille en ce moment sur un autre projet de Blog, de fond celui-là, avec de vrais morceaux de réflexion philosophique à l'intérieur.

Je vous tiens au courant dès qu'il est en ligne, mais soyez rassurés, d'une manière ou une autre, je ferai la jonction entre les deux.

Y.

02 mai 2007

Autoroute déserte et Wittgenstein

Ainsi donc ai-je décidé de rester dans mon collège lot-et-garonnais l'année prochaine. Il ne sera sans doute pas facile de vivre une moitié de la semaine à Agen et l'autre moitié à Paris, mais "aux âmes bien nées ... "

Je sais, c'est un peu abrupt comme introduction mais on fait comme on peut, hein.

Non, puisqu'il faut parler de quelque chose, soyons original, laissons la politique de côté,

(j'vous jure, dans ma vraie vie, je fais plus que ça, militer, tracter, boîter, discuter, débattre, angoisser, convaincre, déprimer, espérer, pleurer de joie (ou pas), prier, stresser, ...)

et parlons de trucs sans intérêts, ce qui, vous le reconnaîtrez aisément, est ma spécialité.

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Bizarrement, en revenant de Bordeaux jeudi dernier, j'ai repensé à Wittgenstein. Oui ça m'arrive, de temps en temps. Déformation professionnelle, tu vois le truc ? Hop, une petite pensée philosophique par ci, une petite réflexion qui mange pas de pain par là. En l'occurrence, faut me comprendre, y'avait personne sur l'autoroute. Pas même deux poids lourds à la ronde pour s'éclater au jeu du "je-te-double-gros-con-et-en-plus-je-te-nargue-à-coups-de-klaxon", le truc qui dure 5 minutes et qui fait bien chier les 300 automobilistes qui s'entassent derrière et dont je fais TOUJOURS partie. Non, vraiment, personne.

Et que croyez vous qu'il advînt ? Wittgenstein, pardi. Je m'attendais vraiment pas à le croiser, celui-là. Hegel, encore. Marx, pourquoi pas. Ou Bergson, tiens. En fait, la liste est longue. Tous, sans doute, tous (oui, même Saint-Augustin, Dieu m'en est témoin) mais pas Wittgenstein.

Donc, Bordeaux - autoroute - pas un chat - moteur qui ronronne - radio qui crachotte - et paf! Wittgenstein.

Mon cerveau s'est retourné comme une crêpe. En deux temps trois mouvements, Wittgenstein en avait fait le siège et je rendais les armes. Un coup de maître.

C'est là que j'ai commencé à délirer. A moment donné, je crois que j'ai même pensé quelque chose comme "hé mais c'est qu'il a peut-être raison, en plus".

Mon Dieu, j'en tremble encore.

18 avril 2007

Blog, marguerites et bordel

Il est des blogs comme des fleurs.

Des être fragiles dont le coeur bat au rythme des saisons et des évènements du monde. Des êtres vivants, dirions nous, et - qui sait ? - nous aurions probablement raison.

Fleur, ce blog a connu sa période de repos, endormi sous une épaisse couche de tristesse, de remord, de regret.
Fleur, il renaît à présent, bien aidé, il est vrai, par un printemps riche en évènements politiques.
Or, plus qu'une autre, mon âme se nourrit de ces lentes pulsations - bien trop irrégulières à mon goût - que seule émet la Politique, cette ombre qui plane constamment sur nos vies.
Fleur, ce blog va évoluer parce que j'ai évolué, et c'est bien comme ça.

Un peu plus politique, un peu plus sérieux, un peu moins centré sur moi (Dieu merci je n'étais donc pas condamné à exorciser mes démons) et beaucoup plus sur les autres.

Et comme aux fleurs dont les couleurs attirent et flattent la vue, vous lui pardonnerez ses excroissances, sa dissymétrie, son côté bancal.

Et puis, la vie c'est aussi le bordel, c'est même peut-être le bordel avant tout. J'ai compris ça récemment et je crois qu'il faudra y réfléchir un peu plus longuement. Peut-être que la perfection, c'est le juste équilibre - toujours approché, jamais atteint - entre l'organisation du bordélique et la "bordélisation" de l'organique ?
Plus tard...

Alors, en résumé, ce blog oscillera entre billets politiques et philosophiques que je tâcherai de rendre clairs pour les premiers, longs pour les seconds, mais aussi de petites chroniques de ma vie de surveillant, et parce qu'on n'échappe jamais à soi-même, je pense ne pas trop me griller en annonçant que je ferai encore la part belle à mes états d'âme.

Il est des blogs comme des fleurs.
Si le mien pouvait ressembler à une marguerite qu'on effeuille de temps en temps, comme pour se changer les idées, cela me conviendrait assez.

Un blog comme une fleur et des billets comme des pétales.
Voilà un joli programme pour un joli jour de printemps.


10 avril 2007

Le gène de la connerie ?

Plus que douze jours avant le vote. Et une campagne qui part en vrille.

Prenez ces propos incroyables de Sarkozy sur la génétique et le "caractère inné", selon lui, de la pédophilie et du suicide.
Sitôt prononcés, ces mots ont été vivement condamnés par l'ensemble des généticiens, des humanistes, chrétiens, répuclicains de tout bord. Tant mieux.

Deux ou trois choses à dire, quand même, sur ces propos dangereux qui rappellent bien des mauvaises choses.

1) Sarkozy défendant l'idée d'un déterminisme, lui le tenant d'un libéralisme forcené, c'est quand même sacrément paradoxal.
Ben quoi Nicolas ? Quid de la liberté d'entreprendre, de la liberté des hommes ? Quid de la volonté humaine ? Il n'est pas lieu ici de disserter sur l'opposition fondamentale entre déterminisme et liberté humaine, mais sa simple évocation témoigne sans doute de la contradiction idéologique interne au candidat de l'UMP.
Et surtout de son opportunisme politique.


2) Plus grave, la pente glissante sur laquelle se place N. Sarkozy. Evidemment, celui-ci n'a en tout état de cause pas fait mention d'eugénisme, mais ses propos ouvrent la voie à toute une série de questions qui renvoient au début du XXème siècle, et que la science, si naïve, croyait avoir à jamais écartées.
Déjà, il y a un an, Sarkozy voulait s'employer à déceler les délinquants dès l'âge de trois ans. Bien heureusement, là encore, c'est toute la communauté des psychiatres, psychologues, sociologues, neurologues, qui a protesté contre ce projet.
Néanmoins, ces tentatives récurrentes de dénicher au sein de l'individu les traces préexistantes d'une "fêlure originelle" ou d'une prédisposition au meurtre, à la pédophilie, au crime, manifestent bel et bien d'une idéologie néo-conservatrice très en vogue dans certains milieux américains.
Ce n'est donc plus la société, dans sa violence et sa dureté qui serait responsable du basculement de certains individus. La psychologie ? Renvoyée elle aussi à ses chères études. Toutes ces sciences humaines qui racontent un parcours, une histoire des individualités ne signifient plus rien dès lors qu'on leur substitue la détermination des gènes et de l'ADN.
Le déterminisme, c'est la négation des histoires individuelles, des trajectoires et des variations, des rencontres et du mouvement. De la vie elle-même.

3) Plus inquiétante encore la défense de Nicolas Sarkozy. Interrogé ce matin (France 2) sur ces propos, il précise :

"Qui peut me dire que c'est normal d'avoir envie de violer un petit enfant de trois ans? Est-ce que c'est un comportement normal ?"

Personne ne peut le dire en effet... Et heureusement ! Mais ainsi, dès que l'on n'est pas d'accord avec Sarkozy, cela signifie de facto que nous trouvons "normal d'avoir envie de violer un enfant de 3 ans" !
Pense-t-il vraiment cette énormité ? Je me sens personnellement humilié par ces propos, humilié et insulté.
Si Nicolas Sarkozy renvoie tous les gens qui osent contester ses idées du côté des pédophiles, des fraudeurs, des criminels, alors ce type-là est fêlé.
Véritablement branque.

Relisez bien ces deux phrases.

"Qui peut me dire que c'est normal d'avoir envie de violer un petit enfant de trois ans? Est-ce que c'est un comportement normal ?"

Imaginer ce mec à la tête de la France me fait vraiment flipper. Et ce n'est pas exagéré.

31 mars 2007

Faites pas les cons...




Foutez moi Sarko dehors !

27 mars 2007

Des gamins

Pardon pour les espaces de plus en plus longs entre chacun de mes billets. Mais ce blog est le mien, et donc il vit à mon rythme, mes respirations sont les siennes, mes silences sont les siens.

Un blog un peu plus aéré, pour ne pas dire aérien, voilà ce qu'il nous faudrait.

Aujourd'hui j'ai passé une journée pleine. Une journée au collège, évidemment.

Comme j'en ai marre de mes collègues - hormis deux ou trois véritables amis, les autres me gonflent sévère - je préfère passer ma journée au plus près des élèves. Plus reposant, plus rafraichissant, plus intéressant.

De fait, étant de réfectoire, j'ai pu me changer les idées en passant de table en table et en échangeant quelques mots avec chacun des 400 élèves qui utilisent le self chaque jour.

Ce qui est intéressant dans un collège comme celui-ci, c’est de constater à quel point ces gosses évoluent dans des mondes différents et imperméables les uns aux autres.
Selon qu’ils seront en « Générale » ou en « SEGPA », qu’ils seront latinistes ou non, qu’ils choisiront Allemand ou Espagnol en seconde langue, disons les choses telles qu’elles sont : selon leurs origines et leurs conditions sociales, ces élèves-là ne vivront pas les mêmes expériences, ne seront pas confrontés aux mêmes soucis, ni aux mêmes problématiques.
En vérité, il y a dans un établissement scolaire, comme dans la société, différents groupes sociaux faisant l’expérience d’autant de réalités différentes.

Ainsi, Camille, élève latiniste de troisième, 15 de moyenne générale, n’a-t-elle pas remarquée aujourd’hui qu’une bagarre violente avait opposé Steven et Sélim, deux élèves de cinquième SEGPA en échec scolaire, simplement parce que l’espace dans lequel elle évolue ne rencontre jamais- et je dis bien JAMAIS - le leur.

Dès lors, comment ne pas voir les barrières sociales qui existent au sein même de ces mini-sociétés que sont les établissements scolaires ?

Pourtant, au-delà de toutes ces différences et ces oppositions fondamentales, il existe un point commun entre toutes ces existences. Par-delà ces abîmes qui ne cessent de se creuser avec l’âge, révélateur tragique de la faillite de notre système éducatif, il y a bien quelque chose qui unit tous ces gamins : le fait, précisément, qu’ils ne sont QUE des gamins.

Ce qui ressemble fort à une lapalissade (« un collège est rempli de collégiens ») est en réalité un argument très puissant contre les défenseurs de la répression des mineurs, très en vogue en ces temps sarkozystes.

On ne peut pas mettre en prison des gosses de 15 ans, parce que ce ne sont QUE des gamins, parce que si on gratte un tant soit peu en dessous de la surface, on s’aperçoit très vite qu’il n’y a que des enfants brisés, détestés, délaissés, abandonnés, violentés, des enfants en manque de reconnaissance, en manque de confiance, en manque de projets, en manque de sens, et surtout, surtout, en manque d’amour.

Parce que lorsque le petit délinquant de 14 ans qui a roué de coups un de ses amis se met à pleurer toutes les larmes de son corps, croyez-moi, il n’y a rien de plus (et rien de moins) à voir qu’un gamin qui chiale, un pauvre gamin qui chiale.

Et dès lors que l’on comprend cela, dès lors que l’on voit derrière la violence et l’insolence les marques de la souffrance et du manque d’amour originels, alors et seulement alors peut se faire une éducation.

Sarkozy veut mettre un flic dans chaque établissement. De la répression et de la crainte naîtrait la possibilité du vivre-ensemble.
Faut-il être à ce point éloigné du monde réel pour ne pas voir que c’est de justice et de respect dont ces gamins ont avant tout besoin.

14 mars 2007

Entre les lignes

J'aimerais bien raconter ce merveilleux concert, cette formidable ambiance, l'attente dans le froid et sous la pluie, les américains déchaînés, j'aimerais en être capable mais il m'est impossible pour l'instant de mettre des mots sur tant d'émotion et tant de bonheur.

Alors parlons d'autre chose. De ma candidature pour Sciences-Po Paris, tiens. Du dossier fastidieux à remplir, des lettres de recommandation à récupérer, des vieux diplômes à retrouver.

Et quand on fouille dans les anciennes chemises de cours qui ont plus de 5 ans d'âge, on tombe forcément sur des choses qui pincent le coeur. Des petits mots d'amour griffonnés sur les coins de page, des "je t'aime" qui se nichent entre deux citations de Montesquieu, des "Mon coeur" qui peuplent des prises de notes trop ennuyeuses.

C'était le bon vieux temps, celui où tu rencontres l'amour de ta vie sur les bancs de la fac (littéralement), où tu suis les cours avec elle, la main droite qui prend les notes, la main gauche sur sa cuisse. Où tout est prétexte à un petit sourire discret entre deux interventions à l'oral.

Bon. Pour la première fois depuis longtemps, j'ai pleuré à chaudes larmes devant tant de bons souvenirs.
Histoire de me rendre compte à nouveau que je ne l'oubliais pas. Et que je l'avais bien dans le coeur.

Donc si je comprends bien, j'en suis toujours au même point.
Rassurant !

12 mars 2007

Il y a 7 jours .. Salomé

Il y a 7 jours, Lundi 05 Mars, 8H du matin.

J'ai l'esprit un peu embrumé, parce que m'attend le lendemain le concert de ma vie. J'ai l'esprit un peu assombri, parce qu'en entrant dans ma vie scolaire, j'aperçois furtivement le siège sur lequel Salomé avait l'habitude de venir me faire la causette. Ha décidemment, les derniers mois vont être longs, pour sûr.

8H10. Je range quelques papiers, j'engueule quelques élèves, je plaisante avec d'autres, une journée banale se profile, mais quand même, au fond de moi un grand vide.

8H15. Solenne et Jennifer, meilleures amies de Salomé, entrent dans le bureau, la mine sombre. Je les regarde, et nous nous comprenons.

Jennifer : T'as vu hein, il manque quelqu'un quand même.
Moi : Oui, oui, c'est sûr...
Solenne : T'es triste ?
Moi : Bah, oui tu le sais bien.

Et puis... et puis une petite silhouette entre dans la pièce et se plante face à moi en criant "Surprise ". A bien y regarder je le connais ce petit bout de chou qui me fixe le sourire jusqu'aux yeux. Je crois bien que je le connais.

Solenne et Jennifer se marrent, moi je réalise, enfin j'essaye.
Le petit bout de chou est en réalité une petite fille, et dans sa voix résonne une assurance qui n'est pas de son âge.

Solenne et Jennifer se marrent. La petite fille sourit toujours, sans me lâcher des yeux.

"Oh. Salomé."

C'est tout ce qui sort de ma bouche. Les seuls mots que je parviens à bégayer.

Solenne et Jennifer se marrent. La petite fille m'explique quelque chose, mais je ne comprends pas très bien. C'est à la fois très compliqué et très beau à entendre. Il y est question de rester jusqu'à la fin de l'année, de changement de régime, de maman qui ne part plus.

La petite fille sourit toujours, ouvre son sac, en sort une petite sphère rouge, l'ouvre et me tend un chewing-gum : "Tiens, prends en un".

En silence, j'obéis.

Elle : Allez, à plus tard.
Moi (de plus en plus ridicule) : Oui, Salomé, oui.

Solenne et Jennifer se marrent toujours en quittant le bureau. Salomé sourit et s'en va.

J'ai le coeur au bord des lèvres.

...

Quelle belle semaine...

Il y a tant de choses à dire. Permettez que je fasse un billet pour chacune d'entre elles ?

Merci.

04 mars 2007

J - 2


"Oh my God, wait and see what will soon become of me? "

03 mars 2007

L'aveu

"L'aveu est devenu, en Occident, une des techniques les plus hautement valorisées pour produire le vrai. Nous sommes devenus, depuis lors, une société singulièrement avouante. L'aveu a diffusé loin ses effets : dans la justice, dans la médecine, dans la pédagogie, dans les rapports familiaux, dans les relations amoureuses, dans l'ordre le plus quotidien, et dans les rites les plus solennels ; on avoue ses crimes, on avoue ses péchés, on avoue ses pensées et ses désirs, on avoue son passé et ses rêves, on avoue son enfance ; on avoue ses maladies et ses misères ; on s'emploie avec la plus grande exactitude à dire ce qu'il y a de plus difficile à dire ; on avoue en public et en privé, à ses parents, à ses éducateurs, à son médecin, à ceux qu'on aime ; on se fait à soi-même, dans le plaisir et la peine, des aveux impossibles à tout autre, et dont on fait des livres.
On avoue - ou on est forcé d'avouer. Quand il n'est pas spontané ou imposé par quelque impératif intérieur, l'aveu est extorqué ; on le débusque dans l'âme ou on l'arrache au corps. Depuis le Moyen Age, la torture l'accompagne comme une ombre, et le soutient quand il se dérobe : noirs jumeaux.

[...]

L'obligation de l'aveu nous est maintenant renvoyée à partir de tant de points différents, elle nous est désormais si profondément incorporée que nous ne la percevons plus comme l'effet d'un pouvoir qui nous contraint ; il nous semble au contraire que la vérité, au plus secret de nous-même, ne "demande" qu'à se faire jour ; que si elle n'y accède pas, c'est qu'une contrainte la retient, que la violence d'un pouvoir pèse sur elle, et qu'elle ne pourra s'articuler enfin qu'au prix d'une sorte de libération. L'aveu affranchit, le pouvoir réduit au silence ; la vérité n'appartient pas à l'ordre du pouvoir, mais elle est dans une parenté originaire avec la liberté : autant de thèmes traditionnels dans la philosophie, qu'une "histoire politique de la vérité" devrait retourner en montrant que la vérité n'est pas libre par nature, ni l'erreur serve, mais que sa production est tout entière traversée des rapports de pouvoir.
L'aveu en est un exemple.
Il faut être soi-même bien piégé par cette ruse interne de l'aveu, pour prêter à la censure, à l'interdiction de dire et de penser, un rôle fondamental ; il faut se faire une représentation bien inversée du pouvoir pour croire que nous parlent de liberté toutes ces voix qui, depuis tant de temps, dans notre civilisation, ressassent la formidable injonction d'avoir à dire ce qu'on est, ce qu'on a fait, ce dont on se souvient et ce qu'on a oublié, ce qu'on cache et ce qui se cache, ce à quoi on ne pense pas et ce qu'on pense ne pas penser."

Michel Foucault, Histoire de la sexualité - La volonté de savoir

28 février 2007

J - 6



Plus que 6 jours à attendre...

J'en peux plus, putaing, j'en peux plus !

15 février 2007

Evy

Il y a une manière infaillible de repérer un menteur :

C'est un type qui affirme qu'Evangeline Lilly n'a aucun charme.




Ou alors c'est juste un gros con.

14 février 2007

Salomé

Il était une fois une petite fille qui s'appelle Salomé.
Salomé a 11 ans et des poussières mais dans ses yeux brillent des lueurs qui font trébucher le Temps. Salomé est toute petite, Salomé est minuscule, mais sa frimousse d'enfant contraste avec son regard adulte.

Salomé est un de ces petits êtres étranges qui, bien que n'ayant vécus qu'une dizaine d'années sur cette Terre, sont capables d'embrasser le monde dans un regard et de le comprendre instantanément, comprendre sa complexité et son essence tragique, comprendre la vacuité des choses mais aussi leur beauté. Des petits êtres étranges qui sont capables de sentir ce qui se cache au-delà de l'immédiateté du donné, ce que leurs propres parents, vous, moi, la majorité des gens ne parviendront sans doute jamais à faire durant toute leur vie.
Salomé fait partie de ces enfants-là.

Ses yeux noirs sont si vifs qu'ils semblent transpercer tout ce qu'ils touchent, et lorsque Salomé me regarde, j'ai l'impression qu'elle voit en moi et qu'elle me sait.

Salomé est légèrement typée, et porte sur son visage la belle contradiction des "préadolescents" : les rondeurs de l'enfance conjuguées à la finesse de traits et de lignes qui s'esquissent progressivement et annoncent l'arrivée prochaine et inéluctable d'une transformation définitive et totale.

Quand Salomé sourit, son visage s'illumine et l'innocence éclabousse le monde. Quand Salomé rigole, son rire, cri de petit oiseau frêle, éclate en cascade et remplit le vide qui tous nous sépare. Et de toutes ses dents qui continuent de tomber, Salomé rit, elle rit à s'en fendre le coeur, et à travers elle ce sont tous les enfants de la Terre qui rient ensemble. Et voilà que la vie revêt son plus simple apparat, celui de la naïveté de l'enfance, celui de la beauté de l'innocence, celui de la pureté.

Salomé fait de la danse, et parfois elle me montre ce qu'elle a appris, et pour cela elle saute comme seuls peuvent le faire des enfants, les pieds plus haut que la Lune et les yeux dans les étoiles.

Salomé a l'âme d'un leader, alors je la surnomme 'Mon Général'. Quand Salomé parle, les autres se taisent, et écoutent. Comme s'ils avaient déjà compris, déjà sentis qu'elle serait toujours et à jamais celle qui dirige, celle qui sait, celle qui commande. Naturellement.
Et quand elle me parle, à moi, qui la domine de toute ma taille, il y a derrière son sourire sincère tellement d'assurance et de volonté que je reste la plupart du temps sans voix. Et même si je la pare de toute l'autorité du monde, Salomé sait que je sais, elle sait ce qui se passe vraiment et cela fait de nous deux des complices involontaires mais éternels dans ce grand jeu solitaire qu'est la vie.

Salomé, à l'orée d'un monde nouveau qui se déploie sous ses pieds et à la fin d'un âge doré dont elle ne fera probablement jamais le deuil.
Salomé, môme de 11 ans dans un collège en ZEP de province.

Et moi, qui ne suis rien de plus que son surveillant, j'ai plus appris d'elle en quelques mois que de la plupart des gens en plusieurs années. Entre nous deux, cette complicité inouïe que rien ne laissait présager. Salomé, évidemment, est "ma chouchou". Je suis, c'est bien normal, sa "grande personne préférée".
Salomé pourrait être ma fille, je pourrais être son grand frère.


Mais voilà. Salomé déménage dans une semaine. Vendredi, elle quittera définitivement le collège. Nous ne nous reverrons jamais. C'est bête, mais cela m'affecte profondément. Mardi soir, à la fin de la dernière heure d'étude, Salomé a fait semblant de traîner, elle a attendu que tout le monde sorte de la pièce, et puis elle s'est dirigée vers moi, lentement. Elle a levé son visage vers moi, qui la contemplait de tout là-haut, et j'ai vu qu'il était plein de larmes. Salomé pleurait, et pourtant, ses yeux ne me lâchaient pas du regard. Intensément, Salomé me fixait en pleurant.

Et puis, dans un instant unique de grâce que je n'oublierai jamais, Salomé m'a dit de sa petite voix fluette et de cette façon si originale de s'exprimer : "Si tu veux toujours te souvenir de moi, il faudra que tu appelles ta fille comme moi".

"Il faudra." Non pas "tu pourrais" ou "il faudrait", bien sûr que non. Il faudra. "Mon Général" n'a pas encore pris sa retraite, grand merci.

Et puis Salomé est partie, parce que les bus scolaires n'attendent jamais, pas même les leaders, pas même les petits êtres extraordinaires que Dieu s'amuse quelquefois à saupoudrer sur le monde.

Moi, je n'ai rien dit, que croyez vous... Je l'ai juste regardée, j'ai souri, sans doute bêtement. Je l'ai regardée s'en aller doucement, ses petites bottes rouges s'éloigner, et c'est comme si tout le poids du monde pesait sur mes épaules.
Cette gamine qui s'en va, c'est un petit bout de vie qui s'échappe et qui meurt.

Mardi, Salomé a pleuré parce qu'on ne se verra sans doute plus jamais.
Moi, j'ai du attendre ce matin avant que ne viennent les larmes.

Ainsi va Salomé, à jamais en avance sur les hommes et le monde.

27 janvier 2007

Boite

Un jour, quelqu'un m'offrira une de ces grandes boites en bois sculpté dans laquelle on fourre tout et n'importe quoi. Et dans cette boite, je te mettrai, toi. Toi et tous mes souvenirs, toi et tout ce que tu représentes, toi et tout ce que j'ai ressenti en 5 ans.
Les sentiments qui piquent aux yeux comme ceux qui écrasent le fond du ventre. La douce et soyeuse odeur de ta peau. Les larmes salées et les baisers sucrés.

De cette boite je ferai une part de moi-même. Je l'envelopperai dans un épais coton de regrets et d'amour éternels, et je la rangerai dans le grenier du temps.

Par delà les années, quand mon coeur se sera agrippé sur d'autres pierres, capté par d'autres phares lointains, tous plus imaginaires les uns que les autres, cette petite boite-là continuera à respirer ses souvenirs dans la poussière. Et son souffle, éternellement mêlé à celui de mon âme, ne cessera jamais.

La vie c'est sans doute ça. Un ensemble de petites boites scellées que l'on a remplies sans s'en rendre compte au fil du temps.

Dis, tu voudrais pas m'aider à rouvrir la tienne ? J'ai tellement de choses à y mettre encore. Dis, tu veux bien ?

Reprise

Il se pourrait bien que je relance ce Blog. J'ai pris tellement de retard sur tout ce que j'avais à dire, sur tout ce qui m'était arrivé depuis quelques mois...

France, Inès, Ségolène, mon déménagement à Paris, etc.

Je ne sais pas par où commencer. Ha si, peut-être en soulignant que demain, cela fera 6 mois que France est partie.
Et qu'hier cela faisait trois mois que j'ai embrassé Inès.

Comme quoi, toute ma vie tourne définitivement autour de ces deux femmes. C'est ma destinée, sans doute. Où que j'aille, quoi que je fasse, elles seront toujours là, toutes les deux. Et alors que je n'ai plus France, c'est Inès qui maintenant se livre.

("Les deux femmes de ma vie")

Aurais-je de la chance dans mon malheur ?

Lettre à Inès



Lorsqu'il faudra garder de l'année 2006 quelques souvenirs, quelques faits marquants, quelques anecdotes, que restera-t-il ?

Bien évidemment, le souvenir de France, ce jour-là, son regard plein de larmes mais déterminé. Le grand vide qui s'est emparé de moi, sans doute. L'impression de pourrir en dedans, de crâmer au dehors. Le sentiment que tout s'effondre, l'impérieuse nécessité de se nicher en soi, se recroqueviller sur soi-même et attendre la fin. Attendre sans rien espérer de soi ni des autres. 2006 aurait pu finir sur le constat amer mais lucide d'une vie qui se fracasse trop vite, de tout ce temps qu'il reste et dont on ne sait plus quoi faire.

2006 aurait pu finir ainsi, si tu n'étais pas arrivée. Si tu n'avais pas ouvert tes grands yeux ce 5 octobre, si cette soirée n'avait pas été parfaite comme elle le fut, alors oui, 2006 aurait été une année à oublier.

Mais ce soir-là, il s'est passé quelque chose, une chose extraordinaire que je ne saurai jamais expliquer, et depuis... hé bien je revis.

Alors je garderai aussi et peut-être avant tout de 2006 ton sourire, tes yeux, ta façon si gracieuse, si féminine de te déplacer dans l'espace, ton visage qui s'illumine, et la chaleur de ton corps.
Je garderai aussi le souvenir de mon coeur cognant fort dans ma poitrine dès que je te vois, mon ventre qui explose quand tu te serres contre moi, et la sensation exquise de désir et d'envie qui se saisit de moi dès que tu m'embrasses.

Si vivre est affaire de sensations, alors je ne me suis jamais senti aussi vivant. Et si aimer, c'est connaître quelques instants d'éternité en se perdant dans le regard de l'autre, alors il se pourrait bien que je t'aime comme je n'ai jamais aimé.

Vivre et aimer, deux choses qui me semblaient depuis peu antagonistes, voilà qu'en quelques semaines, tu leur as redonné du sens. Peut-être ne mesures-tu pas réellement ce que peut signifier "donner du sens" à la vie de quelqu'un... De mon point de vue, il n'y a rien de plus beau et de plus fort.

Alors voilà. Tu as sauvé 2006, et tu lui permettras de garder une trace éternelle au fond de mon coeur, juste à côté d'une autre marque, plus sombre celle-là, froide aussi, celle de France. Tu as sauvé 2006, et rien que pour cela, je t'en serai à jamais reconnaissant.

Et 2007 se profile qui annonce des temps incertains. Du moins paraît-il. Je fais pour ma part le pari que 2007 sera une année de renouveau et si Dieu veut, notre année à nous. Quoi qu'il en soit, que cette année soit belle et qu'elle nous apporte ce que nous recherchons tous : l'espoir.

Puisse-t-elle m'offrir à travers toi ce que 2006 s'achevant me permet d'espérer : la douce et délicieuse sensation d'un bonheur entrevu.
Je t'aime.

(Lettre envoyée le 30 décembre 2006)